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n°25 - Juillet 2023

Edito

Benoit Collard, secrétaire général de Symbiose

Le monde agricole doit se prendre en main

Benoit Collard

Symbiose a commencé à travailler des projets à l’échelle de la parcelle (parcours pédagogiques de Berru) à ses tous débuts en 2012 pour parvenir à des projets à l’échelle de plusieurs départements (six pour le projet Apiluz) depuis trois ans.
Cela pourrait nous satisfaire, mais je pense que nous pouvons encore aller plus loin.

Nous sommes en effet à l’aube de très grands changements, notamment de nos pratiques agricoles. Le monde agricole doit se prendre en main pour répondre à tous les enjeux de l’agro-écologie : développer les auxiliaires de cultures, augmenter la ressource alimentaire pour les pollinisateurs et l’avifaune, rééquilibrer les écosystèmes, lutter contre l’érosion des sols… Les agriculteurs ne peuvent pas y répondre seuls.
Il faudra les accompagner et pour cela, le besoin de financement est important.
Où le trouver ? Les multiples filières présentes dans la région travaillent leurs projets chacune de leur côté. Or la biodiversité est un besoin commun à toutes les filières. C’est quelque chose d’horizontal.

Nous, agriculteurs, demandons à toutes nos filières de répondre à cet enjeu agro-écologique en travaillant ensemble avec un financement qui pourrait être à l’image de celui de l’Accir (don d’un millième du chiffre d’affaires de la récolte). Le chiffre d’affaires de l’ensemble des filières du territoire champardennais représentant au moins cinq milliards d’euros, cela dégagerait un budget d’au moins 5 millions d’euros.
Nous aurions alors un certain poids pour aller démarcher les financeurs publics pour qu’ils y contribuent d’autant. Si nous ne le faisons pas, les agriculteurs se verront imposer des recettes toutes faites qui ne les satisferont pas.

La biodiversité est un bien commun.
Elle doit être reconnue par tous comme un élément de production au même titre qu’une culture !

L’actualité de l’association

Assemblée générale le 20 juin dernier

L’association Symbiose pour des Paysages de Biodiversité a tenu son assemblée générale à la Cheppe (Marne) le mardi 20 juin. Les différents projets conduits par Symbiose en 2022 ont été présentés : Apiluz, Plantons des haies, le partenariat URCA-Symbiose ainsi que les nouveaux projets initiés cette année avec deux projets Trame bleue (valorisation des mares du Chaourçois dans l’Aube et mise en œuvre d’aménagements d’hydrauliques douces dans les Ardennes) auxquels s’ajoute un projet de création et restauration de la Trame verte dans le Sud Marne.
La partie statutaire s’est poursuivie par une visite sur le terrain commentée par Jérémy Miroir, écologue, sur l’intérêt des aménagements (bords de chemin, bords de champs, haies, bosquets…) pour les auxiliaires des ravageurs des cultures.
Retrouvez les retombées presse sur notre site internet.

Plantons des haies : la Marne 1ère du Grand Est

Début 2021, l’Etat engageait 50 M€ pour déployer la trame verte au niveau national avec le programme «Plantons des haies» dans le cadre du Plan de relance. Objectif : 7 000 km de haies dont 1 000 km dans le Grand Est sur la période 2021-2024.
Dans la Marne, Symbiose a candidaté pour animer ce programme avec ses partenaires compétents pour la réalisation du projet : la Fédération des Chasseurs de la Marne (FDC51) pour l’accompagnement individuel et collectif des plantations de haies, la chambre d’agriculture de la Marne (CA51) pour les projets d’agroforesterie, l’Adasea et la FDSEA 51 pour la communication et les relais dans leurs réseaux.

Plus de 110 agriculteurs volontaires ont été rencontrés en 2021 et 2022 par la FDC51 et la CA51 pour 84 projets accompagnés et un total de 167 km de plantation (22 km de haies simples, 65 km de haies doubles et plus de 15 km d'arbres intra-parcellaires).
La Marne est le département du Grand Est qui a planté le plus de haies. L'organisation de Symbiose en guichet unique proposant des projets clés en main a été un réel facteur de succès pour cette opération.

Suite partenariat Symbiose-URCA : une expo et une conférence à la Foire de Châlons en septembre

Deux articles scientifiques issus de ce partenariat qui vise à identifier les conditions d’amplification de l’agroécologie en Champagne devraient paraître en septembre 2023 : un en français dans la revue POUR (revue du Groupe Ruralités, Education et Politiques) et un second en anglais dans la revue Natures Sciences et Sociétés.

En septembre prochain auront également lieu à la Foire de Châlons une exposition (sur toute la durée de la Foire) et une conférence (le 5 septembre après-midi) sur le thème « Infrastructures agro-écologiques : quels bénéfices pour les systèmes de grandes cultures en Champagne crayeuse ? ».
L’exposition s’attachera à :
-montrer comment depuis le milieu du 18ème siècle le rôle et la place des infrastructures agroécologiques (IAE) en Champagne crayeuse ont oscillé entre éléments à supprimer et ressources à valoriser
-présenter les enjeux de la transition agro-écologique pour l’agriculture champenoise
-mettre en avant les intérêts et bénéfices des IAE pour des systèmes de grandes cultures en Champagne crayeuse et pour la biodiversité.
Lors de la conférence, Caroline Gibert, experte en lutte biologique chez Solagro présentera les bénéfices des IAE pour des systèmes de production en grandes cultures et leurs conditions d'obtention. Son intervention sera suivie du témoignage de Jean-Bernard Guyot, agriculteur et président de l'Association Agroforesterie Nord-Est, sur la faisabilité technique et la rentabilité économique de ses parcelles bio conduites en agroforesterie.
Plus d’informations : conférence , exposition
Inscription à la conférence : https://forms.gle/B6vPRwTbmz8Nbbcm7

L'avancée des projets

1-Apiluz : intérêt confirmé pour les pollinisateurs et auxiliaires

Après 1 895 km de bandes de luzerne non-fauchées (BNF) laissées en 2022 par près de 2 422 agriculteurs, le projet a été reconduit en 2023 avec les mêmes objectifs de surface.
2022 ayant connue une météo beaucoup plus favorable aux pollinisateurs, un premier bilan écologique a pu être réalisé par Réseau Biodiversité pour les Abeilles (RBA) concernant l’impact des Bandes de luzerne Non Fauchées sur les pollinisateurs et autres insectes. Une plus grande diversité de pollinisateurs sauvages a été observée en 2022 (comparé à 2021) avec quatre-cinq espèces d’abeilles sauvages et au moins six espèces de bourdons identifiées, auxquels s’ajoutent des abeilles domestiques.
On note également la présence d’auxiliaires avec un pic en juin et en septembre : syrphes, coccinelles, chrysopes tout au long de la saison et des hyménoptères parasitoïdes (petites guêpes) en août. Retrouvez le bilan complet sur notre site internet.
La pérennisation du projet après 2023, date qui marquera la fin du soutien financier de Lidl (environ 50% du projet), est à l’étude. Parmi les pistes potentielles : le souhait des coopératives de déshydratation de luzerne (actuellement partenaires et impliquées sur le terrain dans le projet Apiluz) de créer une organisation de producteurs pour pouvoir accéder à des subventions européennes pour différents projets dont celui du développement de la biodiversité.

A noter que les maires des communes de l’Aube, de la Haute-Marne, des Ardennes et de la Marne, ont reçu une information sur ce projet leur permettant ainsi de communiquer vers leurs citoyens sur des initiatives en faveur des territoires ruraux et de la biodiversité.

2-Projet Sud Marne : un redémarrage sur de nouvelles bases

L’objectif initial était d’accompagner près de 200 agriculteurs des 10 communes situées dans le Sud de la Marne (Montépreux, Lenharrée, Vassimont et Chapelaine, Haussimont, Sommesous, Soudé, Dommartin-Lettrée, Bussy-Lettrée, Vatry, Soudron) dans l’installation et le développement de trames vertes.
Sud Marne
Grâce à l’engagement financier du Groupe Vivescia et ses filiales industrielles (Malteurop, Grands Moulins de Paris et Délifrance), ce projet lancé en 2019, puis mis en sommeil en raison de la période Covid, redémarre sur de nouvelles bases.
Sylvain Duthoit, agronome, de la chambre d’agriculture de la Marne qui pilote le projet d’un point de vue technique a contacté les agriculteurs concernés par le biais des associations foncières. Certaines communes ont exprimé le besoin de redécouper des grandes parcelles issues de remembrements successifs. Au final, 25 km de haies devraient être implantés.
Des mares pourraient également être créées à titre expérimental si l’appel à projet déposé auprès de la Région pour financer le sujet reçoit une réponse favorable dans les prochaines semaines. En effet, la faune favorisée par l’instauration de haies a également besoin d’eau pour se développer.
Ce projet associe les compétences du CPIE, de la FDC51, de l’Adasea, de Miroir Environnement.

3-Trame bleue : valorisation des mares du Chaourçois (Aube)

zone humide (Pixabay pas de CP) 72 ppp
Ce projet concerne six communes du Chaourçois (Chaource, Metz Robert, Les Loges Margueron, Lagesse, Les Granges, Cussangy).
C’est le prolongement des mesures de préservation des batraciens et de leur biotope engagées par l’OFB. Il est financé par le Groupe Vivescia pour 5 ans à hauteur de 150 000 € pour protéger ces mares (30 mares dans un premier temps sélectionnées pour leur intérêt écologique, notamment la présence de tritons crêtés) et leur biodiversité.
Les partenaires impliqués sont le CPIE Sud Champagne, l’OFB de l’Aube et la FDSEA de l’Aube. Le partenariat avec l’OFB apporte au projet une caution scientifique qui sera utile dans les échanges avec les collectivités, la Dreal, la DDT… et fait que ce projet, qui permet de rapprocher deux mondes qui ne se parlaient pas forcément, est très observé au niveau régional et même national.
Sur les 14 exploitants concernés par ces 30 mares, 9 ont déjà confirmé leur volonté de préserver les mares. Un diagnostic écologique a été réalisé en juin avec pour chaque mare un certain nombre de critères écologiques notés en nombre de points. Suivra une contractualisation privée (CPSE) avec chaque agriculteur pour 5 ans avec un cahier des charges individuel des mesures à mettre en oeuvre.
Les exploitants seront rémunérés 400 € la 1ère année, 550 € la seconde année et les suivantes si la biodiversité a évolué positivement comparé au diagnostic initial de cette année, voire 700 € si la mare a atteint le niveau maximal en terme de biodiversité.

4-Trame bleue : gestion et protection des ressources en eau dans les Ardennes

Un second projet Trame Bleue est également par le Groupe Vivescia à hauteur de 150 000 € sur 5 ans pour restaurer et déployer des aménagements d'hydrauliques douces sur les bassins versants des ruisseaux du Longwé et du Lametz qui connaît en effet beaucoup de problèmes d’érosion et d’inondation lors de violents orages.
Inondation champ 72 ppp (Pixabay CP non obligatoire)
Les partenaires impliqués dans ce projet sont la Chambre d’agriculture, la Fédération de Chasse et la Fédération de Pêche du département.
Cinq agriculteurs se sont engagés couvrant l’intégralité du projet.
L’objectif est d’instaurer 300 mètres linéaires de fascines, 1 km de haie et quelques hectares de bandes enherbées. Le projet est actuellement en phase de rédaction des contrats avec les agriculteurs et de consultation des entreprises pour que les aménagements puissent être mis en œuvre cet automne. Une formation pour sensibiliser les agriculteurs des bassins versants aux enjeux a également été réalisée.
Ce projet permet également de faire réfléchir les agriculteurs sur les actions à mener pour lutter contre le réchauffement climatique et sur les conséquences des pratiques culturales sur la qualité des sols.

La biodiversité en Champagne-Ardenne

Comment tirer profit des auxiliaires pour gérer les ravageurs des cultures

On a tendance à classer les insectes en espèces nocives, auxiliaires ou neutre mais la nature n’est pas aussi simple ! « Il n'y a pas d'espèces nocives à 100 %, expliquait Jérémy Miroir, écologue, lors de la sortie sur le terrain suite à l’AG de Symbiose le 20 juin dernier. Par exemple, les méligèthes, ravageurs du colza, sont des vecteurs passifs de pollen beaucoup plus contributifs que les abeilles à un certain stade de la floraison. Il faut « juste » parvenir à un équilibre pour éviter un trop fort développement des ravageurs qui deviennent alors néfastes pour la culture. »
Pucerons sur luzerne
Ce printemps a été marqué par une forte pression de pucerons sur différentes cultures. Pourquoi les auxiliaires n’ont-ils pas fait leur travail ? Les pucerons se développent précocement et de façon exponentielle en raison d’une capacité de reproduction importante. Les auxiliaires (coccinelles larves et adultes, larves de syrphes, larves de chrysopes, punaises prédatrices…) vont consommer ces pucerons en adaptant leur vitesse de reproduction à la quantité présente. Le pic d’auxiliaires sera donc toujours décalé dans le temps par rapport au pic de pucerons.
Coccinella septempunctata et pucerons

Miser sur des aménagements pérennes et à proximité

Comment y remédier ? La majorité des prédateurs font leur cycle en bordure de parcelles. L'agriculteur a donc tout intérêt à avoir en permanence un stock d'auxiliaires présents dans ces bordures pour obtenir un développement de ceux-ci corrélé le plus possible à celui des ravageurs. Or si ces bords de champs sont fauchés en été, les auxiliaires ne pourront pas y réaliser leur cycle. En revanche, les ravageurs, beaucoup plus résistants, pourront persister. Au printemps suivant, ils se développeront bien avant les auxiliaires.

Larve de chrysope
Pour maximiser l’intérêt des auxiliaires en matière de gestion des ravageurs des cultures, il faut donc opter pour des aménagements pérennes : bords de champ et de chemins sans fauche, bandes intra-parcellaires, haies, bouchons…. Deuxième condition : que ces aménagements soient proches des parcelles de culture (pas plus de 500 m) car les auxiliaires ne se déplacent pas sur de longues distances. La multiplication des aménagements permettrait donc d’augmenter le contrôle des ravageurs par les auxiliaires.
Crédit Photo : Jérémy Miroir-Miroir Environnement
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Le projet « Symbiose, pour des paysages de biodiversité » bénéficie du soutien financier public de :
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